Recherche, amplification et titrage de bactériophages

Paris match -  lundi 4 février 2013
Ils sont présents partout autour de nous et nous en respirons sans le savoir. Ces virus, 50 à 100 fois plus petits que les bactéries, sont indispensables à l’équilibre naturel de notre écosystème. « Pour réaliser nos travaux de recherche, nous allons les chercher dans les stations d’épuration des eaux usées de la région parisienne », explique Laurent Debarbieux, de l’Institut Pasteur. Contrairement aux antibiotiques qui combattent les infections sur un large spectre, les phages sont spécifiques et se concentrent sur la bactérie qu’ils vont engloutir. « En fait, c’est le matériel génétique des phages qui s’introduit dans la bactérie, poursuit-il. On assiste à une reprogrammation de la bactérie qui devient une usine à fabrication de phages. » Une véritable armée se constitue et détruit la bactérie responsable en moins de trente minutes.
Mais, comme pour les antibiotiques, une résistance aux phages est toujours possible. « C’est un principe naturel des bactéries que de s’adapter à l’intrus et de résister en reconnaissant l’ennemi, ajoute-t-il. Mais, face à cette résistance nouvelle, on peut concevoir des cocktails de trois à dix phages et contourner cette embûche. » Une façon de permettre à la phagothérapie d’avoir toujours une longueur d’avance sur les bactéries, contrairement aux antibiotiques.
Ces phages, ici en jaune, étudiés à l’Institut Pasteur, vont venir à bout d’une bactérie. Photo grossie 50 000 fois. | Photo Institut Pasteur

Objectifs :  
- Rechercher la présence, dans un échantillon d’eau, de bactériophages capables d'infecter diverses espèces de bactéries et de mettre en évidence leur effet antibactérien naturel comparable à celui d'un antibiotique.
- Titrer les phages (si on en trouve) dans l'échantillon d'eau étudié, c'est à dire déterminer leur concentration en nombre.
- Déterminer le spectre d'infectiosité d'une suspension de phages.

Source : Recherche, amplification et titration de bactériophages issus de l'environnement

Operon 84

Phages

Prélèvements d'échantillons d'eau (Jour -1)
Recueillir 1 ou 2 échantillons d'eau différents en suivant les consignes suivantes  : "Les phages sont présents partout où sont présentes les bactéries ! Plus le cours d’eau est "sale", plus il y a de chance d’avoir des bactériophages. Un prélèvement en aval de la sortie d’une station d’épuration est également envisageable, de même que dans une rivière ou une fontaine)".
-
Prélever 500 mL d'eau en flacoN stérile fermer et noter la provenance exacte de l’échantillon sur le flacon (Utiliser Google Maps pour relever les coordonnées exactes ; noteur l'heure et la date de prélèvement).

Élimination des bactéries des échantillons par filtration sur membrane (par 4 – Jour 0)
Éliminer les bactéries des échantillons d'eau en suivant les consignes suivantes :
-Filtrer, en conditions aseptique, un volume Véchantillon eau = 100 mL avec la rampe de filtration sur une membrane de porosité 0,45 µm, en suivant les consignes de la FT "Filtration de bactériophages".
-
Récupérer le filtrat dans un nouveau flacon stérile de 100 mL noté F.

Membrane de filtration de porosité 0,45 µm

Membrane filtration

Source : https://www.fishersci.fr/shop/products/sartorius-gridded-sterile-cellulose-nitrate-membrane-filters-0-45-m-21/p-4907639

Rédiger une schéma légendé expliquant quels sont les éléments filtrés et les élements retenus sur la membrane

Justifier le fait de jeter la membrane après filtration.

Enrichissement en bactériophages dans les échantillons (par élève – Jour 0)
Procéder à l'enrichissement en bactériophages, éventuellement présents dans les eaux, en suivant les consignes suivantes :
Souches bactériennes (classe 1) :
à Gram négatif : Escherichia coli
à Gram positif : Staphylococcus epidermidis, Bacillus subtilis
-
Prélever 9 mL du filtrat F et les transférer dans 1 tube à essai stérile noté E (pour "enrichissement").
-
Conserver le volume restant du filtrat F à 4 °C pour une utilisation ultérieure.
-
Ajouter 1 mL de milieu Luria Broth LB 10x (concentré dix fois) aux 9 mL d’eau filtrée du tube E.
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À l’aide d’une anse stérile, prélever un peu d'une culture bactérienne (parmi les quatre au choix) et la resuspendre dans les 10 mL de solution du tube E.
-
Fermer le tube et Incuber 24 h à 37 °C

Calculer la concentration finale du milieu LB 10x après ajout du filtrat.

Justifier que cette étape puisse permettre d'augmenter la concentration en bactériophages (dans le cas d'un phage lytique).

Indiquer quel témoin de croissance pourrait être réalisé en parallèle pour montrer que la bactérie-test se développe bien dans le bouillon nutritif.

D'après sa terminologie, quelle est la conséquence de l'infection d'une bactérie par un bactériophage lytique qui lui est spécifique (à vérifier après lecture des géloses).

En déduire l'aspect, après 24 h d'incubation, d'un bouillon nutritif, inoculé par une bactérie-test et dans lequel on aurait introduit un tel bactériophage spécifique de cette bactérie (à vérifier après lecture des géloses).

Élimination des bactéries du bouillon d'enrichissement par filtration sur membrane de porosité 0,45 µm (par élève - jour 1)
Éliminer les bactéries des bouillons d'enrichissement en suivant les consignes suivantes :
-Filtrer 5 mL du milieu d’enrichissement, en condition aseptique avec les seringues de filtration, en suivant les consignes de la FT "Filtration de bactériophages".
-
Récupérer le filtrat dans un tube à hémolyse stérile noté EF. Parafilmer.
-
Le filtrat EF peut être gardé à 4 °C. Les bactériophages sont relativement stables et la préparation peut être conservée au moins une année dans ces conditions

Photographie du système de filtration individuel :

Systeme filtration individuel

Phage filtration bouillon enrichissement

Filtration du bouillon d'enrichissement dans la seringue, sur une membrane de porosité 0,45 µm.
Le filtrat est clair.

Contient-il des phages ? 

Préparation des échantillons à tester pour la recherche de phages (par élève – Jour 1)
Diluer le filtrat du tube EF en suivant les consignes suivantes :
-Diluer en série jusqu'à 10-7 le filtrat EF sous un volume final de 100 µL en tubes Eppendorf stérile.
-
Diluant = eau distillée stérile à 11,4 g · L-1 de CaCl2 (les ions calcium facilitent l’adsorption du phage sur les récepteurs bactériens)

Calculer le volume de filtrat ED à prélever pour préparer la première dilution, puis les dilutions suivantes.

Préparation des milieux de culture (par élève – Jour 1)
Préparer les milieux de culture en suivant les consignes suivantes :
-Sur le fond d'une grande boite de Pétri stérile, tracer 1 cercle central de 1 cm de diamètre et fractionner la boite en 8 parts égales :
Abaque depots spots
-Noter sur la tranche : numéro poste – nom bactérie testée – origine échantillon testé.
-
Couler dans la boite de Pétri 15 mL de gélose "dure" Mueller-Hinton maintenue en surfusion à 55 °C.
-
Laisser la gélose se solidifier (devenir mate).

 

Préparation des cultures bactériennes à tester (par élève – jour 1)
Préparer les cultures bactériennes en suivant les consignes suivantes :
-Préparer une suspension bactérienne en utilisant la même bactérie que celle utilisée pour l'étape d'enrichissement OU utiliser un bouillon de 6 h de la bactérie.
-
Sortir un tube de gélose molle Mueller-Hinton à 6 g.L-1, maintenue en surfusion à 55 °C.
-
Laisser redescendre la température de quelques degrés (environ 45 °C) ==> tube pouvant être tenu à main nue.
-
Inoculer la gélose molle légèrement refroidie avec 0,2 mL de la suspension bactérienne.
-
Homogénéiser rapidement le contenu du tube (vortex).
-
Couler immédiatement la gélose molle inoculée sur la gélose dure solidifiée. Laisser solidifier.
-
Réaliser un isolement de la souche testée, à partir de la suspension, sur une gélose Mueller-Hinton en petite boite de Pétri, afin de vérifier sa pureté.

Expliquer pourquoi il est impératif d'utiliser la même bactérie que celle de l'étape d'enrichissement.

Proposer une hypothèse sur la nécessité d'utiliser une gélose "molle", sachant que les phages ne sont pas dotés de mobilité.

 

Dépôt des échantillons d'eau à tester pour la recherche de phages : technique des spots (par élève – Jour 1)
Effectuer les dépôts en suivant les consignes suivantes :
-Noter au dos de la boite les numéros ou noms des échantillons qui vont être déposé.
-
Déposer lentement au centre 5 μL (P10 + cône stérile) d’eau physiologique stérile (contrôle négatif).
-
Déposer lentement dans un premier secteur 5 μL (P10 + cône stérile) de l’eau filtrée non enrichie F.
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Déposer ensuite lentement, dans chaque secteur restant, 5 μL de l’enrichissement filtré EF de la dilution la plus élevée (EF dilué à10-6) à la dilution la plus faible (EF non dilué) avec le même cône.
-
Laisser les dépôts sécher sur la gélose sans la secouer. Quand la goutte de 5 μL a complètement disparue, incuber la boite à l’envers à 37 °C pendant 18 à 24 h.
-
La boite peut être conservée ensuite à 4°C

Phage methode des spots 2

Schéma de la procédure opératoire (à compléter avec le choix d'instruments de mesure volumétrique adaptés)

Remarque : le schéma et les photos de résultats montrent une procédure dans laquelle seules les dilutions allant jusqu'à 10-3 sont testées

Phages 1

Résultats obtenus (eau testée : échantillon prélevé en surface dans la Sarre, coordonnées : 9°07'39.7"N 7°02'42.1"E)
- à gauche : Escherichia coli
- en haut : Bacillus subtilis
- en bas : Staphylococcus epidermidis

Phages 2018 2b

Phages 2018 1b

Que peut-on observer ?

Qu'en déduire concernant la spécificité de l'infectiosité du/des phages présents dans l'échantillon étudiév?

 

Isolement d'un phage et ré-amplification pour conservation et utilisation ultérieure 
Des bactériophages se sont donc multipliés en infectant des bactéries incluses dans la couche de gélose "molle".
Le découpage d'un fragment de gélose contenant une plage de lyse isolée va permettre de récupérer les phages inclus dans cette gélose en les laissant diffuser dans une liquide stérile.


Photo : découpage d'un carré de gélose dans la plage de lyse :

Recherche phage decoupe gelose

Vidéo : on peut voir 4 fragments de gélose : deux petits carrés de gélose ont été découpés dans des zones de plage de lyse (pouvant donc contenir deux ohages différents, li aurait fallu séparer ces deux prélèvements)
Chaque carré est constitué de deux couches : ne couche de gélose dure et une couche de gélose molle contenant la plage de lyse
Les deux couches se sont séparées après homogénéisation à l'agitateur vortex.

L'objectif est d'infecter les bactéries présentes dans le bouillon par les phages inclus dans la gélose.

Deux bouillons nutritifs stériles ont été inoculés avec un même volume d'une culture d'Escherichia coli 388, pour laquelle nous avions trouvé des bactériophages spécifiques dans l'eau de riviere.
La turbidité était similaire après inoculation.
Le tube de gauche constitue le témoin de croissance.
Le tube de droite contient les fragments de gélose molle dans lesquels sont inclus les phages infecgtant spécifiquement E. coli 388 issus de l'activité précédente.
Après seulement 5 h d'incubation à 37 °C, on constate un trouble important dans le tube témoin de croissance, mais un trouble plus faible dans celui contenant en plus la gélose incluant les phages

Amplification phage vs temoin sans phage


Etapes suivantes :

-Après 18 h d'incubation, filtration sur membrane de 0,45 µm du bouillon d'enrichissement (bactérie + phages) afin d'obtenir un filtrat ne contenant plus que les phages,
-Réalisation de dilution en série jusqu'à 10-12.
-Dénombrement par la technique de référence : incorporation dans 10 mL de gélose molle en surfusion de 200 µL de la bactérie sensible + 100 µL de chacune des cinq dernières dilutions.
-Résultat obtenu après seulement 5 h d'incubation à 37 °C : on voit nettement le tapis bactérien (opaque) littéralement criblé de plages de lyse. 

Sachant qu'une plage de lyse correspond initialement à UNE bactérie infectée par UN phage, et que la photo ci-dessous correspond à un dépôt de 0,1 mL d'une dilution à 10-9, calculer la concentration en nombre de phages présents dans un millitlitre.

Phages plages de lyse 10 9

Phages comparaison dilutions

 

Autre méthode de dénombrement par spots : dépôts de5 µL de dilutions 10-1 à 10-12 (photographie réalisée en 2024 après ré-amplification d'une suspension de phages conservée à -20 °C depuis 2019)

Ampli phages denombrement spots

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dénombrement de phages par la technique d'inclusion en gélose molle incluant la bactérie cible avec 100 µL d'une dilution de suspension de phage

Plage lyse dil 10 5 phage

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Effet de l'ajout de phages spécifiques d'E. coli 388 au cours de la croissance et test de création d'un médicament-phage expérimental par inclusion des phages dans des billes d'alginate

L'hypothèse étant que des phages inclus dans ces billes puissent arriver à en sortir, et essayer de déterminer la "durée de vie" des billes.Premier test de réalisation de billes d'alginate incluant un colorant bleu pour rechercher la diffusion du colorant, ici dans de l'eau thermostatée à 37 °C et en début d'expérience.

Phages essai inclusion alginate 1

Afin de vérifier l'action  des phages, la bactérie-test Escherichia coli est suivie au cours de sa croissance :

Phage croissance temoin coli

En parallèle, un groupe a inoculé le même milieu avec la même bactérie Escherichia coli et un volume connu et titré de phages au temps 0 :

Phage croissance coli et phage

Enfin, un troisième groupe a inoculé le même milieu avec la même bactérie Escherichia coli et des billes d'alginate creuse contenant le phage au temps 0 :

Phage croissance coli et bille phage

Les deux dernières expériences n'ont été réalisées qu'une seule fois mais peuvent néanmoins être exploitées et des hypothèses peuvent être proposées dans chacun des deux cas.

Enfin, au cours d'un suivi de croissance d'Escherichia coli, des phages (amplifiées, isolés et conservés depuis un échantillon d'eau de rivière) ont été ajoutés en phase exponentielle de croissance :

Courbe 2

 

Date de dernière mise à jour : 19/06/2024

Commentaires

  • Pirot

    1 Pirot Le 12/05/2021

    Bonjour et félicitations pour votre site!

    Fabrice PIROT
    Professeur des Universités - Praticien Hospitalier

    Unité de Préparation et de Contrôle des Médicaments
    Plateforme FRIPHARM
    Service Pharmaceutique
    Groupement Hospitalier Centre
    Hôpital Edouard Herriot
    Pavillon X , Place d'Arsonval
    F-69437 Lyon cedex 03 Laboratoire de Pharmacie Galénique Industrielle
    Laboratoire de Biologie tissulaire et Ingénierie Thérapeutique UMR 5305
    Faculté de Pharmacie
    8, avenue Rockefeller
    F-69373 Lyon cedex 08
    Tél : 04 78 78 56 86
    fabrice.pirot@univ-lyon1.fr
    https://univ-lyon1.webex.com/meet/fabrice.pirot

    www.chu-lyon.fr/fr/fripharm
    Fripharm.com
    Tél : 04 72 11 78 70
    fabrice.pirot@chu-lyon.fr




    Responsable Master Sciences du Médicament et des Produits de Santé et du parcours Ciblage Thérapeutique et Epithélium
    master.sciencesmedicament-produits-de-sante@univ-lyon1.fr



    Réseau Bactériophage France
  • Pruvot

    2 Pruvot Le 27/11/2017

    Bonjour,

    votre site est vraiment passionnant.
    Je suis technicienne de laboratoire et nous voudrions travailler sur les phages de bactéries classe 1, ne disposant pas en lycée général du matériel nécessaire pour l'utilisation des classes 2.
    Après essai de recherche de bactériophages dans plusieurs eaux, sur une souche e coli classe 1 ( atcc 25 922 ) nos essais sont restés infructueux.
    Pouvez-vous, s'il vous plait, m'en dire plus (références, fournisseurs, etc...) sur les souches que vous avez employez pour ce TP ?

    Merci d'avance

    Mme Pruvot Isabelle

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